Ainsi parlait Zarathoustra est un poème symphonique écrit par Richard Strauss en 1896.

Richard Strauss
Contexte

Œuvre d’un homme encore jeune, mais en pleine possession de ses moyens, le compositeur nous livre une version personnelle de l’ouvrage du philosophe Friedrich Nietzsche.

Friedrich Nietzsche

Profondément marqué par la lecture du texte poético-philosophique, le compositeur décide de composer un poème symphonique (œuvre libre de forme). Ce n’est toutefois pas un hommage à cette œuvre de Nietzsche qui crée une fracture dans la pensée d’alors (« Dieu est mort, vous le ne saviez pas ? »). L’œuvre musicale s’inspire de 8 passages des 4 parties du texte, dans un ordre indépendant : 1 De ceux des arrières-mondes ; 2 Du grand désir ; 3 Des joies et des passions ; 4 Le Chant du tombeau ; 5 De la science ; 6 Le Convalescent ; 7  Le Chant de la danse ; 8 Chant du somnambule.

Ceux-ci sont précédés par une introduction.

Composition

La musique reflète particulièrement bien le climat nietzschéen; l’exaltation, les passions humaines, la noirceur, le rire, la danse, thèmes chers au philosophe, sont particulièrement présents dans cette œuvre musicale.

Le nihilisme et l’exigence du renouveau sont représentés musicalement  par des modulations fréquentes et parfois radicales, de nombreux changements rythmiques, mélodiques, dynamiques.

La polyphonie et l’utilisation de nombreux motifs y jouent aussi un rôle très important.

L’introduction représente le lever du jour et le réveil de Zarathoustra.

Lever du jour

Elle est écrite en Ut majeur, tonalité franche et rayonnante. Les notes Do, Sol, Do jouées successivement aux trompettes, évoquant par leur rapport d’octave, de quinte et de quarte l’harmonie des sphères ou la musique planétaire selon Pythagore ; l’accord mineur Do-Mib-Sol puis majeur Do-Mi-Sol et la gamme la si do ré mi fa sol, trois éléments caractéristiques des fondements de la musique tonale pour cette introduction saisissante recréant le parcours de l’ombre à la lumière, du néant au vivant.

Les huit parties s’enchainent sans interruption, chacune explorant un élément du texte de Nietzsche : « De ceux des arrières-mondes » commence dans le grave et les instruments sombres de l’orchestre (contrebasses, violoncelles, contrebasson, bassons, clarinettes basses). Credo in unum deum est cité aux cors avant que l’orchestre chante la grande phrase en Lab avec recueillement. « Du grand désir » et «  Des joies et des passions » sont reliés par les mêmes motifs et utilisent l’orchestre de plus en plus massivement. « Le Chant du tombeau » au centre de l’œuvre, d’une polyphonie riche avec ses lignes descendantes ouvre la voie à une fugue « De la Science », utilisant les douze sons de la gamme chromatique (une allusion peut-être au dodécaphonisme et aux nouvelles voies qu’empruntait la musique alors).

« Le Convalescent » est l’Humain qui se libère de ses entraves pour accéder au Surhomme : déchainement de l’orchestre straussien tout entier.

« Le Chant de danse » est une valse jouée au violon solo et reprise par tous les pupitres, la danse et l’exaltation chères au philosophe.

« Le Chant du somnambule » réunissant l’ensemble des thèmes de l’œuvre, sans qu’aucun ne prenne l’ascendant, conclut le poème symphonique sur une interrogation (superposition des tonalités de Si et de Do).

En conclusion

Tout comme Nietzsche dans son ouvrage, Strauss se veut le musicien de l’avenir. Le temps de la musique pure (symphonies, concertos, sonates etc.) est révolu. Aux nouvelles idées doivent correspondre de nouvelles formes musicales : fixer soi-même la règle et la suivre ensuite.

Toutefois, cette pièce demeure relativement énigmatique, et comme Richard Strauss l’écrivit à son ami Romain Rolland : « J’ai voulu exprimer jusqu’à la fin de la symphonie l’impuissance du héros à se satisfaire, ni par la religion, ni par la science, ni par l’humour face à l’énigme de la nature. »

Richard Strauss
Ainsi parlait Zarathoustra
poème symphonique op 30
Orchestre symphonique de Chicago
Dir. Georg Solti
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